Vues de l’installation / Installation views Ulla von Bradenburg, Death of a King, 2012, Agora, Palais de Tokyo, Paris/FR. Courtesy the Artist et Art : Concept, Paris. Photo André Morin

En 2012, le Palais de Tokyo rouvre ses portes après dix mois de travaux. Sa nouvelle configuration fait de l’Agora un « espace central » voué à être au « croisement entre les expositions et les visiteurs ». Avec Death of a king, Ulla von Brandenburg inaugure cet espace, idéalement placé sous une verrière, et révèle sa nouvelle fonction.

Les visiteurs sont invités à entrer dans cette installation monumentale et colorée qui se déploie sur une estrade à deux niveaux, épousant les particularités architecturales du lieu. Ludique, elle évoque un costume d’arlequin par le motif qui recouvre le sol et les murs, et une rampe de skatepark par sa forme en U. Référence au théâtre populaire dans la tradition de la Comedia dell Arte, Death of a king fait également écho aux rampes improvisées des skaters qui s’entraînent sur les marches du parvis du Palais de Tokyo. L’installation rappelle ainsi que le skatepark est aussi une scène où l’on performe sous des regards. L’Agora transformée par Ulla von Brandenburg devient alors un espace intermédiaire, entre la fiction et le réel, le théâtre et la vie.

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Photo © Tom Cornille
Photo © Sigrid Spinnox
Entretien avec Ulla von Brandenburg. Extrait de Introfilm Experience Traps, 2018

« Parce que le théâtre est de toute évidence un moyen de voyager avec l’esprit, il faut se rappeler que ce sont les marins qui, avec leur connaissance des machines, travaillaient dans les théâtres lorsqu’ils étaient à terre. J’aimerais construire une scène faites de voiles, à mi-chemin entre le théâtre et un bateau, amarré sur une pelouse loin de la mer, où la toile de fond ressemblerait aux voiles d’un bateau. »

—Ulla von Brandenburg

Répondant à l’invitation du Middelheim Museum, Ulla von Brandenburg a imaginé pour l’exposition Experience trap (2018) un théâtre en bois librement inspiré des idées novatrices du paysage baroque.

Le traditionnel rideau se décline ici en sept paires de drapés dont les nuances de bleu soulignent la profondeur de l’espace scénique. Ce dernier accueille une performance faisant référence au livre Les États et Empires de l’Europe de Cyrano de Bergerac (1619-1655) et interprétée par le comédien Benoît Résillot. Après la représentation, le visiteur a pu découvrir les dessous de la scène et activer la « machine de la mer ».

Tout comme le jardin baroque, le théâtre utilise des artifices comme la perspective et le trompe-l’œil pour créer des illusions. Ici, un dispositif théâtral ingénieux a été intégré dans la structure scénique pour permettre à « la mer » de se mouvoir. L’utilisation de matériaux simples, planches de bois et textile, rend l’œuvre de Ulla von Brandenburg intemporelle, loin de toute copie historique ou des technologies du théâtre contemporain.

Site du Middelheim Museum

Jeremy Deller, The lovers, 2021, polyuréthane, fibre de verre, acier, polyester, peinture, balançoire. H 300cm.

En 2021, la deuxième triennale d’art contemporain de Courtrai invite les artistes à interpréter le concept de paradis.

Au cœur du parc Messeyne, jardin romantique conçu au XIXème siècle, Jeremy Deller revisite une des plus célèbres scènes de la Bible, devenu un archétype de l’imaginaire collectif occidental. Il s’appuie en particulier sur l’Adam et Eve peint en 1526 par Lucas Cranach, actuellement conservée à la Courtauld Gallery de Londres.

L’imposant couple de personnages blancs de trois mètres de haut sert de structure à une balançoire mise à disposition du public. En proposant une version contemporaine, drôle et fonctionnelle de ce mythe de la création, l’artiste détourne à la fois le contenu de l’iconographie religieuse et la solennité qu’ont habituellement les monuments dans l’espace public.

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Jeremy Deller, Ask The Animals and they will Teach You, Technique mixte, 2021

Ask The Animals and They Will Teach You a été installée à Knokke-Heist, sur le littoral belge, à l’occasion de la Triennale d’art contemporain Beaufort 21.

Cette œuvre, à la fois sculpture et toboggan, invite les enfants à glisser sur la langue d’un imposant caméléon. Placé au centre de la place Van Bunnenplein, l’animal se tient sur un socle gravé sur lequel on peut lire une description de l’espèce. Fidèle à son sens du détournement, Jeremy Deller utilise les codes du monument pour en faire un objet ludique. Au lieu de rendre hommage à un personnage historique, il met en lumière l’une des plus anciennes créatures de la planète, menacée par le réchauffement climatique.

« Les caméléons ont quelque chose de magique, ils peuvent faire des choses dont nous ne pouvons que rêver et sont les plus belles créatures sur Terre. Nous devons leur vouer une véritable adoration » — Jeremy Deller. 

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Hubert Duprat, Sans titre, 2013, plâtre, pots en terre cuite, 232 x 1800 x 15cm

En 2013, 30 ans après la création des Fonds Régionaux d’Art Contemporain, le musée Henri Prades est sollicité par le FRAC Languedoc-Roussillon dans le cadre d’une programmation destinée à valoriser l’ensemble des collections régionales. Mitoyen du site archéologique de Lattara, le musée a vocation à témoigner de la vie quotidienne de la ville dans l’Antiquité.

Le musée organise alors une exposition d’art contemporain consacrée à Hubert Duprat et lui demande d’imaginer une œuvre en dialogue avec les collections archéologiques. Hubert Duprat propose une installation constituée de mille pots en terre industriels enchâssés dans un mur en plâtre de 20 mètres de long qui scinde l’espace dédié aux collections permanentes. Le motif régulier et presque hypnotique ainsi produit apporte un contrepoint contemporain et poétique aux objets antiques, et notamment aux amphores qui lui font face.

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Hubert Duprat, 2009-2012. La Verrière, Bruxelles. Polystyrène, bois et galuchat.

Inaugurée en 2000 à Bruxelles, La Verrière fait partie du réseau international de galeries de la Fondation d’entreprise Hermès. Invité à occuper ce lieu, Hubert Duprat a déployé une imposante architecture de polystyrène orné de rectangles de galuchat, un cuir haut-de-gamme utilisé en maroquinerie. Cette forteresse blanche qui occupe l’espace jusqu’à presque l’obstruer étonne tant par son ampleur que par le choix et l’usage des matériaux. Le polystyrène et le galuchat, s’ils ont une texture granuleuse similaire, créent cependant un saisissant contraste, en termes de densité, d’apparence et de valeur symbolique.

« [Cette] structure blanche qui nous ramène au modernisme géométrique et aux méthodes autonomes de l’art du début du XXe siècle. Mais il y figure un élément trouble-fête, que nous suggère le titre dérivant du mot anglais shagreen : peau de raie ou de requin, dont les rectangles semblent servir d’agrafes pour maintenir l’objet blanc et exigent un savoir-faire et une expertise traditionnels, de sorte que l’œuvre évoque le laps de temps entre l’époque du fait main, de l’artisanal, et l’industrie moderne, ou plutôt les fond l’un dans l’autre. »*

*Martin Herbert, « Une vision holiste », in TextWork, Fondation Ricard, juillet 2019

Richard Fauguet, Sans titre, 2011. Éléments de fumisterie, lampes et câblage électrique / chimney engineering/ aluminium pipes and lamp. 1 300 × 400 × 350 cm. Courtesy the Artist and Art : Concept, Paris. Collection Mac/Val, Vitry-sur-Seine/FR. Photo André Morin.

Des tuyaux de cheminée dessinent dans l’espace un attelage de treize mètres de long tiré par quatre cavaliers. L’habitacle est une chaise démesurément agrandie où le visiteur est invité à prendre place. En déjouant l’usage industriel du matériau, l’artiste magnifie des tubes d’acier, élément de fumisterie, pour créer une sculpture monumentale. Il joue sur le double sens de ce mot, « fumiste » désignant aussi bien un chauffagiste qu’une personne peu sérieuse. Depuis les années 1990, Richard Fauguet observe les cheminées, les formes variées des tuyaux et systèmes de chauffage. Il retrouve ainsi la figure de Dark Vador dans les aspirateurs de cheminée. Motif récurrent chez l’artiste, il prend ici des allures de chevalier des temps modernes. Le travail de l’artiste emprunte au quotidien ses matériaux : formica, verre de Vallauris, pyrex, tubes d’acier. Autant d’éléments divers, clinquants ou désuets, qu’il assemble pour créer un décalage kitsch entre la forme et le fond, à la lisière de l’histoire de l’art et de la culture populaire. Ce jeu de construction en trois dimensions fait notamment écho aux pratiques d’assemblages des Nouveaux Réalistes.

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A propos de Richard Fauguet

Experience #10 – 2012/2013.

A l’occasion du 10e anniversaire d' »Expériences Pommery »
Commissaire : Bernard Blistène, directeur du département du développement culturel du Centre Pompidou.

« Faire chic avec du cheap »

Pour cette exposition, Richard Fauguet réemploie et assemble des opalines chinées. Tirant partie de la transparence vitreuse du verre et de leur forme, l’artiste métamorphose ces objets du quotidien devenus désuets en luminaires exceptionnels.

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Vidya Gastaldon, Escalator (Rainbow Rain), 2007, laine, fils, baguettes de tilleul, 700 x 100 cm

Escalator (Rainbow rain) se présente comme une multitude de liens suspendus donnant l’illusion d’une pluie de pétales colorés, au-dessous et autour de laquelle le public peut circuler. Ces fines suspensions sont faites de laine, de fil et de bois. Grâce à leur accumulation, Vidya Gastaldon rend, avec des matériaux très ordinaires, le scintillement de matières précieuses et l’impression de légèreté et d’intangibilité d’un arc-en ciel. L’artiste révèle ainsi le potentiel symbolique de ces objets du quotidien, qu’elle rapproche d’« un art de la tranquillité, du dimanche et des jours fériés ».

Acquise par la collection Pinault, cette œuvre a été montrée à de multiples reprises. Mais c’est sans doute lors de sa première exposition au sein du Palazzo Grassi que l’effet produit, en relation avec la fastueuse architecture du palais, a été le plus saisissant. L’illusion des lumières, curatée par Caroline Bourgeois, « sans se limiter aux seules dimensions physiques et esthétiques de la lumière, […] abordait à la fois ses enjeux symboliques, philosophiques voire politiques à travers les œuvres d’une vingtaine d’artistes contemporains. ».

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Geert Goiris, Centrochelys Sulcata, 2017, papier peint, Installation, Site Rubis Terminal à Rouen/FR

En 2017, dans le cadre d’une collaboration du Frac Normandie Rouen avec Rubis Mécénat, Geert Goiris sillonne douze zones portuaires appartenant à l’entreprise Rubis Terminal. De cette expérience résulte Peak oil, un travail photographique sur le thème du paysage industriel contemporain. Ce corpus d’images se matérialise sous différentes formes : une exposition au Frac, une édition et deux installations. L’une d’elles, Centrochelys Sulcata, consiste en un affichage monumental sur les réservoirs du site de Rubis Terminal à Rouen d’une photograpie représentant une tortue sulcata.

« La tortue sulcata représentée est un emblème de longévité et de stabilité, et peut être considérée comme un véritable fossile vivant dont l’origine remonte à la préhistoire. Elle fait ainsi écho, selon l’artiste, aux hydrocarbures dont la société est dépendante. En transférant cette tortue sulcata aux gigantesques réservoirs de Rubis Terminal Rouen, Geert Goiris établit une analogie entre l’animal et l’activité pétrolière liée à ce territoire industriel. » — Geert Goiris (Rubimecenat.fr)

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